3 JOURS A QUIBERON
de Emily AtefGENRE : DrameAllemage · 2018 · 1h54 · Vostf
Avec : Marie Bäumer, Birgit Minichmayr, Robert Gwisdek
1981. Pour une interview exceptionnelle et inédite sur l'ensemble de sa carrière, Romy Schneider accepte de passer quelques jours avec le photographe Robert Lebeck et le journaliste Michael Jürgs, du magazine allemand "Stern" pendant sa cure à Quiberon. Cette rencontre va se révéler éprouvante pour la comédienne qui se livre sur ses souffrances de mère et d'actrice, mais trouve aussi dans sa relation affectueuse avec Lebeck une forme d'espoir et d'apaisement.
Femme au destin tragique, comédienne sublime, Romy Schneider demeure une figure mythique du cinéma européen du XXe siècle. De la trempe de ces stars que le cinéma moderne ne parvient plus à insuffler dans l’inconscient collectif – voir la photo quinquagénaire d’Alain De- lon (prise par Jean-Marie Périer sur le tournage de La Piscine) mise au goût du jour pour servir d’égérie à un parfum en 2018. L’histoire de 3 jours à Quiberon n’achoppe nullement sur cette vision monumentale de Romy Schneider. Nul ersatz de biopic que ce récit de la dernière interview donnée en allemand par l’actrice à une presse qui ne lui pardonna jamais d’avoir tourné le dos à son pays et à Sissi ; c’est la détresse d’une femme en proie avec ses démons intérieurs qui intéresse une nouvelle fois la cinéaste Emily Atef (L’Étranger en moi, 2008). D’abord filmée de dos sur une musique aux accents sardiens (le thème des Choses de la vie transpire littéralement de la bande originale composée par Christoph Kaiser), la comédienne Marie Bäumer se retrouve, dès le premier plan du film, au cœur d’un dispositif (en noir et blanc) qui assume la distance de la représentation avec une réalité enfuie, celle d’une comédienne en pleine crise existentielle avant ce qui sera son tournage ultime (La Passante du Sans-Souci). Une fois dissipé le trouble de la ressemblance entre les deux actrices, on se passionne pour cette lente introspection d’une personnalité complexe, ambivalente (« une personnalité borderline mais ce n’était pas une victime » aime à rappeler Emily Atef), à l’état émotionnel intense. Autour d’elle, trois protagonistes principaux constituent autant de perspectives qui permettent d’atteindre la vérité du personnage. Et cette vérité culmine dans une séquence de bar (on pense à Sautet), plus encore que dans la crudité de l’interview : au bras d’un Denis Lavant idoine en poète alcoolisé, on y voit Romy se jeter opiniâtrement dans la fête. Peu importent au fond les libertés prises avec le réel (on sait que le personnage de son amie et confidente, Hilde – touchante Birgit Minichmayer – a peu à voir avec la véritable amie qui était à Quiberon effectivement). L’article du Stern et les nombreux clichés de Robert Lebeck ne sont que le point de départ documenté du film. Car 3 Jours à Quiberon finit par être une œuvre sur l’éthique et sur la confiance donnée. Que fait-on de ce que les artistes livrent en pâture ? Beau- coup seraient avisés de se poser la question. ⎥ Nicolas Milesi
de Emily AtefGENRE : DrameAllemage · 2018 · 1h54 · Vostf
Avec : Marie Bäumer, Birgit Minichmayr, Robert Gwisdek
1981. Pour une interview exceptionnelle et inédite sur l'ensemble de sa carrière, Romy Schneider accepte de passer quelques jours avec le photographe Robert Lebeck et le journaliste Michael Jürgs, du magazine allemand "Stern" pendant sa cure à Quiberon. Cette rencontre va se révéler éprouvante pour la comédienne qui se livre sur ses souffrances de mère et d'actrice, mais trouve aussi dans sa relation affectueuse avec Lebeck une forme d'espoir et d'apaisement.
Femme au destin tragique, comédienne sublime, Romy Schneider demeure une figure mythique du cinéma européen du XXe siècle. De la trempe de ces stars que le cinéma moderne ne parvient plus à insuffler dans l’inconscient collectif – voir la photo quinquagénaire d’Alain De- lon (prise par Jean-Marie Périer sur le tournage de La Piscine) mise au goût du jour pour servir d’égérie à un parfum en 2018. L’histoire de 3 jours à Quiberon n’achoppe nullement sur cette vision monumentale de Romy Schneider. Nul ersatz de biopic que ce récit de la dernière interview donnée en allemand par l’actrice à une presse qui ne lui pardonna jamais d’avoir tourné le dos à son pays et à Sissi ; c’est la détresse d’une femme en proie avec ses démons intérieurs qui intéresse une nouvelle fois la cinéaste Emily Atef (L’Étranger en moi, 2008). D’abord filmée de dos sur une musique aux accents sardiens (le thème des Choses de la vie transpire littéralement de la bande originale composée par Christoph Kaiser), la comédienne Marie Bäumer se retrouve, dès le premier plan du film, au cœur d’un dispositif (en noir et blanc) qui assume la distance de la représentation avec une réalité enfuie, celle d’une comédienne en pleine crise existentielle avant ce qui sera son tournage ultime (La Passante du Sans-Souci). Une fois dissipé le trouble de la ressemblance entre les deux actrices, on se passionne pour cette lente introspection d’une personnalité complexe, ambivalente (« une personnalité borderline mais ce n’était pas une victime » aime à rappeler Emily Atef), à l’état émotionnel intense. Autour d’elle, trois protagonistes principaux constituent autant de perspectives qui permettent d’atteindre la vérité du personnage. Et cette vérité culmine dans une séquence de bar (on pense à Sautet), plus encore que dans la crudité de l’interview : au bras d’un Denis Lavant idoine en poète alcoolisé, on y voit Romy se jeter opiniâtrement dans la fête. Peu importent au fond les libertés prises avec le réel (on sait que le personnage de son amie et confidente, Hilde – touchante Birgit Minichmayer – a peu à voir avec la véritable amie qui était à Quiberon effectivement). L’article du Stern et les nombreux clichés de Robert Lebeck ne sont que le point de départ documenté du film. Car 3 Jours à Quiberon finit par être une œuvre sur l’éthique et sur la confiance donnée. Que fait-on de ce que les artistes livrent en pâture ? Beau- coup seraient avisés de se poser la question. ⎥ Nicolas Milesi