Le Mal n’existe pas

Le Mal n’existe pas

Le Mal n’existe pas

Réalisateur(s) : De Ryūsuke Hamaguchi
Acteur(s) : Hitoshi Omika, Ryo Nishikawa, Ayaka Shibutani
Genre(s) : Drame
Origine : Japon
Durée : 1h47
Synopsis : Takumi et sa fille Hana vivent dans le village de Mizubiki, près de Tokyo. Comme leurs aînés avant eux, ils mènent une vie modeste en harmonie avec leur environnement. Le projet de construction d’un « camping glamour » dans le parc naturel voisin, offrant aux citadins une échappatoire tout confort vers la nature, va mettre en danger l’équilibre écologique du site et affecter profondément la vie de Takumi et des villageois...

Lion d’Argent à la Mostra de Venise 2023, cette nouvelle œuvre de Ryūsuke Hamaguchi est le fruit d’un processus de création bien singulier, résultant d’une collaboration avec la compositrice de musique Eiko Ishibashi (qui avait signé la B.O de Drive My Car) pour un concert accompagné de projections d’images muettes. « Cela a vraiment représenté un pari fantastique. Je me suis mis à réfléchir à tout ce qui est visuel d’une façon plus pure et dynamique qu’auparavant » explique Hamaguchi, qui tourne près du lieu de résidence de la compositrice et choisit finalement d’y rester pour réaliser un long-métrage réutilisant la matière musicale et visuelle de ce premier projet. La musique précède donc le film, et le réalisateur lui laisse une place de choix qui s’apparente à celle d’un protagoniste invisible dont la voix, les notes, circulent entre les lignes du récit de manière aussi lancinante qu’harmonieuse. Car il y est justement question d’harmonie. De la tragique, et très actuelle, problématique de l’harmonie possible ou non du monde vivant. De celle qui s’observe, dans l’envoûtante séquence introductive, entre un Eden sauvage – une montagne, ses sources, ses multiples essences, sa faune discrète et fragile – et les villageois qui le peuplent. Celle-là même qui voit sa concorde menacée par un projet de construction d’un camping haut de gamme pour citadins. Encore une fois, Hamaguchi vient ainsi interroger le vivre ensemble, en ajoutant à son propos une dimension environnementale et en procédant, comme il sait habilement le faire, à un renversement des points de vue pour laisser le spectateur sonder les forces en présence. Le mal n’existe pas ne peut toutefois se résumer à un drame confrontant monde rural et urbain, car sa narration est imprégnée de mystère, de poésie et de polysémie. Aussi le cinéaste déjoue-t-il nos attentes, notamment dans le mouvement final, brutal, flirtant avec le thriller et le fantastique, pour signifier, peut-être, une colère face à l’impossible réconciliation du vivant. ⎥ Noémie Bourdiol

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