A MON SEUL DÉSIR

Derrière ce titre idéaliste emprunté à la moyenâgeuse « Dame à la Licorne », la réalisatrice Lucie Borleteau (Fidelio, l’Odyssée d’Alice – 2014) propose un film beau et joyeux, ancré dans le féminisme complexe – c’est une qualité ! – de notre temps et qui déroule une courageuse sincérité. Non contents d’avoir été alpagués par Elody (Laure Giappiconi, « la patronne » du cabaret, franche et concrète en toutes circonstances), nous voilà invités à suivre le regard d’Aurore (Louise Chevillotte, que l’on devine aussi audacieuse que son personnage) dans ce qui s’apparente à une ode à la liberté – et qui demande un engagement certain ! « Je suis honnête avec mon désir » déclare la jeune novice qui se lance dans le strip-tease. Au diapason de cette ligne directrice, le film orchestre non seulement de sensuelles mises en scène mais fait aussi montre de convictions politiques pour le moins séduisantes. Évitant le glauque attendu autant que les poncifs des soi-disant rivalités féminines, À mon seul désir leur préfère une sororité tout aussi réaliste sans faire preuve d’angélisme pour autant. Incarnant Mia, celle qui initiera Aurore aux mœurs des salons interlopes, Zita Hanrot excelle dans ce rôle d’une apprentie-comédienne dont on comprend peu à peu que les effeuillages ne comportent pas que de lucratifs intérêts. Le désir vous submerge parfois et il a aussi beaucoup à voir avec l’employabilité des actrices… Film en dehors des clous, plus baroque que didactique, rythmé de spectacles musicaux et colorés, À mon seul désir accomplit à merveilles sa propension à bousculer les consciences. « Sortez de chez vous, les filles ! Ce n’est pas parce que vous prenez des risques qu’on vous retrouvera en petits morceaux au fond d’une malle. » C’est là une injonction parmi d’autres – tout aussi judicieuses – qui émaillent ce film sensationnel. ⎥ Nicolas Milesi