COMPÉTITION OFFICIELLE

Au sortir du plus grand festival de cinéma du monde, sur le tapis rouge duquel les plus grands talents côtoient les vanités les plus abyssales, le moment est idéal pour se laisser emporter par ce film crâne de Mariano Cohn et Gastón Duprat. Le talentueux duo de cinéastes argentins qui nous avait régalés avec L’Homme d’à côté (2009) et Citoyen d’honneur (2016) a encore frappé un grand coup ! Œuvre frontale, Compétition Officielle dépeint les répétitions préalables au tournage d’un film comme autant de situations où l’absurde le dispute à la satire mordante. Les comé- diens et la cinéaste au travail sont brillamment incarnés par trois des plus grandes stars latino de la planète cinéma (certainement eux-mêmes très aguerris aux rivalités en usage). Oscar Martinez pleure sur commande, Antonio Banderas joue l’ivresse au degré d’alcool près et Penélope Cruz, plus solaire que jamais, bouffe l’écran – bref, trois magnifiques comédiens hors de pair, auxquels Compétition Officielle doit beaucoup. À l’écriture, les deux cinéastes s’aident à nouveau du fidèle Andrés Duprat, qui, par ailleurs, est aussi le directeur du prestigieux Musée national des Beaux-Arts de Buenos Aires. Son accointance avec les installations pourvoyeuses de sens génère ici de réjouissantes trouvailles scénaristiques, dans des décors à la fois farfelus (la forêt de micros), burlesques (le rocher suspendu) et à l’expressionisme joyeusement surchargé.
Bien plus qu’un film sur les coulisses du cinéma, Compétition Officielle s’intéresse aux motivations qui poussent des hommes et des femmes à s’unir pour provoquer des émotions chez des spectateurs. Les films sont souvent très bons quand il racontent le cinéma. Riche d’une pertinente lucidité, cette farce pointe non sans cruauté l’égocentrisme endémique dans le 7e art. Jouissif. ⎥ NICOLAS MILESI