FOXTROT

FOXTROT

FOXTROT

Réalisateur(s) : Samuel Maoz
Acteur(s) : Lior Ashkenazi, Sarah Adler, Yonaton Shiray
Genre(s) : Drame
Origine : Allemagne, France, Israël
Durée : 1h53
Synopsis : Michael et Dafna, mariés depuis 30 ans, mènent une vie heureuse à Tel Aviv. Leur fils aîné Yonatan effectue son service militaire sur un poste frontière, en plein désert. Un matin, des soldats sonnent à la porte du foyer familial. Le choc de l’annonce va réveiller chez Michael une blessure profonde, enfouie depuis toujours. Le couple est bouleversé. Les masques tombent.

En 2010, avec Lebanon, Samuel Maoz avait signé un huis clos éprouvant (la première guerre du Liban vue depuis l’intérieur d’un char) auquel le Lion d’Or à Venise avait apporté un retentissement mondial. Titulaire du Grand Prix lors de la dernière édition vénitienne, Foxtrot devrait connaître un destin similaire, tandis que la vindicte de la ministre de la Culture israélienne à son encontre n’a fait qu’affermir son succès commercial.
Dans Foxtrot, il est question de hasard, de destin, et de personnages piégés par leur propre aveuglement : le film est bien architecturé en un triptyque similaire à celui de la tragédie grecque classique, même si la mécanique de son récit ménage de fausses pistes.
S’ouvrant par une scène qualifiée par le réalisateur de « mythique, presque banale, de l’existence israélienne (l’annonce de la perte d’un soldat) », Foxtrot est d’abord froid et symétrique, scrutant les réactions ambivalentes du père, Michael (la star israélienne Lior Ashkenazi), dans son vaste appartement chic de Tel Aviv. Très vite, les atours de sa réussite sociale ne résistent pas aux prises de vue plongeantes qui semblent assujettir le personnage au sens du sacrifice ambiant et à la culpabilité quasiment érigée en hymne national. À la fin, le récit s’attardera davantage sur le personnage de la mère, Dafna (Sarah Adler, pas mal vue chez Amos Gitaï), dans un clair obscur chargé de non-dits émouvants. Entre les deux, Foxtrot revient en plein désert, à ce check-point où Yonatan fût posté avec d’autres jeunes soldats. Dans cette sorte de lieu refoulé qui sera le théâtre d’une bavure de l’armée, entre les prises de vues surréalistes et le ton onirique, le film prend toute sa dimension allégorique et hypnotise. Non sans drôlerie parfois, son esthétique scénique révèle l’absurde artificialité d’un système enfermé dans un cercle vicieux. À l’image du fox-trot et de ses pas de danse giratoires. Politiquement dense, Foxtrot permet au réalisateur de livrer une vision embarrassante – et pessimiste – de la société israélienne : une société qui a instrumentalisé la mémoire de la Shoah pour servir une politique sécuritaire et répressive. Et si Foxtrot était d’abord un film sur le cynisme ? ⎥ Nicolas Milesi

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