La Disparition de Josef Mengele

« Adapté du formidable roman-enquête éponyme d’Olivier Guez (2017), le film se concentre sur l’exil du SS, jamais repenti, dans divers pays d’Amérique du Sud, au gré de ses changements de planques et d’identité. À la différence d’Adolf Eichmann, débusqué par le Mossad à Buenos Aires et ramené en Israël pour y être jugé puis pendu, Mengele (August Diehl, glaçant) vivra clandestinement entre l’Argentine et le Brésil — avant de s’y noyer, en 1979. Une injustice, un scandale, une infamie, eu égard à ses crimes. Même s’il n’hésite pas à emprunter les codes du film d’espionnage (noir et blanc, suspense), le réalisateur n’a jamais une once de pitié pour son héros, qu’il dépeint comme un homme immonde de bout en bout, aveuglé par sa haine et sa fidélité pathologique à l’idéologie hitlérienne. En témoigne cet éprouvant flash-back en couleurs à Auschwitz, présenté dans la logique du personnage comme idyllique, et dans lequel on voit le jeune médecin se livrer à des opérations monstrueuses. Si ces images abjectes enfreignent en connaissance de cause le tabou de la représentation des camps, elles offrent un contrechamp terrible et nécessaire à l’angle mort choisi par Jonathan Glazer dans La Zone d’intérêt qui avait laissé l’atrocité du génocide hors champ. Dans les pas de son compatriote Elem Klimov (Requiem pour un massacre), Serebrennikov nous oblige à voir. Et à trembler. » – Télérama