Voilà un mélodrame comme on les aime. Une ampleur romanesque, des personnages féminins attachants, singuliers, travaillés. Et puis cette ambiance brésilienne, prise ici à contrepied. Nous sommes plongés, immergés dans le Brésil des années 50, bigarré. Un Brésil où la soif d’émancipation féminine se cogne sans cesse au poids de l’Église, aux traditions, à un ordre patriarcal et social inflexible. Et pourtant les deux sœurs magnifiques ont de la ressource et de l’espoir à revendre. On sent que ce scénario a été poli, version après version, ses sinuosités nous emmènent suivre ces deux itinéraires de vie avec une grande empathie et une rare délicatesse. Il égrène l’étirement du temps, cette langueur qui finit par envelopper les personnages. À l’arrivée, Karim Aïnouz dresse un constat amer, critique d’une société corsetée qui broie les destins féminins. Dans la section Un Certain regard au dernier Festival de Cannes, La Vie invisible d’Euridice Gusmao (titre d’une actualité saisissante qui fait écho au film français du début d’année : Les Invisibles), le film a remporté le Grand Prix dans une sélection particulièrement relevée. Il est sélection à l’Oscar du meilleur film étranger. Il est également présenté en compétition au Festival du Film d’Histoire. Il est promis à un très bel accueil. Après Aquarius et Bacurau de Kleber Mendonça Filho (présent au Festival !), le cinéma brésilien revient en force. Pour combien de temps ? ⎥ François Aymé
LA VIE INVISIBLE D’EURIDICE GUSMÃO
Réalisateur(s) : Karim Aïnouz
Acteur(s) : Carol Duarte, Julia Stockler, Gregório Duvivier
Genre(s) : Drame
Origine : Brésil, Allemagne
Durée : 2h19
Synopsis : Rio de Janeiro, 1950. Euridice, 18 ans, et Guida, 20 ans, sont deux soeurs inséparables. Elles vivent chez leurs parents et rêvent, l’une d’une carrière de pianiste, l’autre du grand amour. A cause de leur père, les deux soeurs vont devoir construire leurs vies l’une sans l’autre. Séparées, elles prendront en main leur destin, sans jamais renoncer à se retrouver.