MANCHESTER BY THE SEA

MANCHESTER BY THE SEA

MANCHESTER BY THE SEA

Réalisateur(s) : Kenneth Lonergan
Acteur(s) : Casey Affleck, Michelle Williams, Kyle Chandler
Genre(s) : Drame
Origine : USA
Durée : 2h18
Synopsis : MANCHESTER BY THE SEA nous raconte l’histoire des Chandler, une famille de classe ouvrière, du Massachusetts. Après le décès soudain de son frère Joe (Kyle Chandler), Lee (Casey Affleck) est désigné comme le tuteur de son neveu Patrick (Lucas Hedges). Il se retrouve confronté à un passé tragique qui l’a séparé de sa femme Randi (Michelle Williams) et de la communauté où il est né et a grandi.

Depuis combien de temps n’avait-on pas vu un film américain donner à ce point du temps au temps, et privilégier si fortement l’épaisseur de ses personnages et le déploiement complexe de leur histoire ? Le voilà donc, cet objet à la profondeur romanesque, signé par un réalisateur de plus de 50 ans, Kenneth Lonergan (…). On est sûr de tenir là un des quelques très beaux films américains de ces dernières années. Manchester by the Sea nous présente Lee Chandler, homme à tout faire d’un immeuble de Boston, Massachusetts. La petite quarantaine, solitaire, Lee assure son job sans passion, semble indifférent aux avances des femmes qu’il croise, se castagne dans les bars pour un oui ou pour un non. Il semble éteint, cassé de l’intérieur, vivant sa morne vie comme un robot. Ce quadra dépressif est joué par un Casey Affleck à son plus haut, épatant de dureté minérale, laissant deviner tout au fond un cœur prêt à vibrer encore. Un jour, Lee reçoit un coup de fil. Son grand frère vient de décéder. Il doit retourner dans leur petite ville portuaire (Manchester, donc, à quelques kilomètres au nord de Boston), où il apprend en sus qu’il a été désigné comme tuteur de son neveu, Patrick, 16 ans (Lucas Hedges, très bon comme tout le reste du casting). Le film va s’attacher à montrer la relation complexe entre Lee et Patrick, sa dimension à la fois amicale et filiale, compliquée par l’âge de Patrick, l’éveil de sa sexualité et les prémices de l’âge adulte. (…) Réduit à son pitch, Manchester by the Sea pourrait passer pour un mélo facile, un tire-larmes simpliste, un roman-photo un peu tarabiscoté. C’est justement toute la réussite de Lonergan que de nourrir son synopsis, de donner de la chair à ses grandes lignes. Il y parvient grâce au temps. D’abord le temps de déployer un récit riche en virages et en couches dramaturgiques ; de regarder le charmant paysage maritime du Massasuchets ; de traiter chaque scène avec toute l’intensité et la durée requises, sans hâter le tempo et sans non plus s’appesantir artificiellement ; d’entrer en empathie avec les protagonistes avant de révéler les ressorts secrets qui les habitent et les travaillent. Ensuite, traiter le temps comme le faisait Proust, soit comme un feuilleté de temporalités qui se mélangent sans cesse, où le passé agit sur le présent, où le temps subjectif perturbe le temps objectif, où les années qui ne passent pas viennent ombrer les années qui passent. Le vrai sujet de ce film, c’est cette ombre, ces cendres du temps, comment on s’en libère un peu, beaucoup, ou pas du tout, comment vivre avec. (…) Kenneth Lonergan vient de pondre, en toute humilité, un grand et superbe spécimen de cette espèce en voie de disparition : le mélodrame.
⎥ Les Inrockuptibles

Partager