Anne Fontaine et son co-scénariste Pierre Trividic entrelacent leurs re- gards et leurs univers dans ce beau portrait de jeune homme en devenir. Trividic est le co-auteur de L’Autre, avec Dominique Blanc, d’après Annie Ernaux, elle-même ayant semé les petits cailloux qui ont fait d’Edouard Louis un auteur plébiscité du soi, son livre étant une des sources du film. Le monde est rond… C’est pourtant à la manière d’un kaléidoscope tou- jours en mouvement, reflétant les états d’enfance et de jeune adulte de Marvin, Bijou ou « le squelette » qu’Anne Fontaine filme ce double d’Ed- dy Bellegueule. Vie brisée, reflets parcellaires, illusion ou réalité, Mar- vin se présente et se représente entre souvenirs d’enfance, aspiration à grandir et projections (aux sens propre et figuré) de sa vie passée et future. Préférant le théâtre à la littérature, les scénaristes nous offrent la parfaite mise en abyme des questionnements du jeune homme, qui joue sa vie sur scène après s’être joué la vie, enfant, dans une famille malhabile, assortie d’une scolarité douloureuse. Mise en jeu de son corps d’enfant harcelé, corps enjeu de son épanouissement d’adulte, le film est le récit de la « belle éducation » que quelques bienveillants lui pro- digueront, pour l’amener sur la voie d’un accomplissement que son en- fance ne semblait pas autoriser. Comme toujours chez Anne Fontaine, les portraits sont doux, sensibles et sensuels, même quand la vie ne l’est pas. Et les formidables jeunes acteurs Jules Porier et Finnegan Oldfield sont portés par la subtilité du jeu de leurs aînés, tous acteurs de théâtre respectés. ⎥FLORENCE LASSALLE

MARVIN OU LA BELLE ÉDUCATION
Réalisateur(s) : Anne Fontaine
Acteur(s) : Finnegan Oldfield, Vincent Macaigne, Catherine Salée, Grégory Gadebois, Jules Porier, Charles Berling, Catherine Mouchet, Isabelle Huppert
Genre(s) : Drame
Origine : France
Durée : 1h55
Synopsis : Martin Clément, né Marvin Bijou, a fui. Il a fui son petit village des Vosges. Il a fui sa famille, la tyrannie de son père, la résignation de sa mère. Il a fui l’intolérance et le rejet, les brimades auxquelles l’exposait tout ce qui faisait de lui un garçon «différent». Envers et contre tout, il s’est quand même trouvé des alliés. D’abord, Madeleine Clément, la principale du collège qui lui a fait découvrir le théâtre, et dont il empruntera le nom pour symbole de son salut. Et puis Abel Pinto, le modèle bienveillant qui l’encouragera à raconter sur scène toute son histoire. Marvin devenu Martin va prendre tous les risques pour créer ce spectacle qui, au-delà du succès, achèvera de le transformer.