NOMADLAND

NOMADLAND

NOMADLAND

Réalisateur(s) : Chloé Zhao
Acteur(s) : Frances Mc Dormand
Genre(s) : Drame
Origine : USA
Durée : 1h48
Synopsis : Après l’effondrement économique de la cité ouvrière du Nevada où elle vivait, Fern décide de prendre la route à bord de son van aménagé et d’adopter une vie de nomade des temps modernes, en rupture avec les standards de la société actuelle. De vrais nomades incarnent les camarades et mentors de Fern et l’accompagnent dans sa découverte des vastes étendues de l’Ouest américain.

« Tout ce dont on se souvient vit. » Voilà l’une des belles convictions auxquelles ce magique Nomadland nous accoutume, à travers la seule pérégrination de Fern, son héroïne omniprésente. Sous les traits de Frances McDormand, visiblement habitée par ce projet – qu’elle a aussi initié en tant que co-productrice – Fern est de ces travailleurs pauvres qui sillonnent les États-Unis, astreints à la saisonnalité précaire des emplois peu qualifiés. Désignés comme « les pionniers d’aujourd’hui » par la propre sœur de Fern, cette communauté de « sans maison » (« house less ») qui ne sont pas « sans abris » (« home less ») témoigne aussi d’un mode de vie infiniment libertaire dont le libéralisme économique s’accommode avec plus ou moins de cynisme. S’en tenant à filmer les nomades et jamais leurs employeurs – dont on connaît par cœur les logos et la vision du monde, la cinéaste Chloé Zaho ajoute une pierre (précieuse et pertinente) à une œuvre naissante, intimement américaine (Les Chansons que mes frères m’ont apprises, 2015 ; The Rider, 2017), attentive aux individus fragiles et marginaux, aux prises avec un système qui les désavoue en même temps qu’il les constitue. Dans Nomadland, le vérisme cher à la cinéaste est d’autant plus saisissant que sont présents les personnages réels du récit de la journaliste Jessica Bruder, dont le film est l’adaptation. Au-delà de son titre allégorique, ce road-movie à haute teneur emblématique s’ouvre en dénommant explicitement « Empire » la ville ruinée dans laquelle Fern se voit contrainte de tout abandonner pour aller survivre ailleurs, si possible sans se retourner. Cette Amérique post-crise financière qu’elle arpente volontairement seule avec de nombreux autres tout aussi solitaires semble livrer chacun à des horizons tour à tour prometteurs ou blafards. Avec Joshua James Richard, chef-opérateur fidèle de la première heure, la cinéaste adoucit dans les lumières crépusculaires la dure réalité qu’elle dépeint, suggérant aussi que d’apaisantes révélations surgissent humblement pour qui sait les guetter. À travers l’histoire émouvante de Fern, Nomadland parvient à assimiler avec délicatesse le départ perpétuel des nomades à une initiation au départ plus douloureux des êtres chers. Voilà l’autre conviction sereine et universelle – « Il n’y a pas d’adieu définitif »  – à laquelle rallie non sans noblesse Nomadland, un film enraciné aux États-Unis et profondément issu de son temps. ⎥ Nicolas Milesi

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