Dans son précédent film (Derrière les collines, 2012), Samanta Yépez avait marqué les esprits en recueillant les terribles récits des témoins des « exécutions extralégales » de l’état Colombien. Pays Castor est pétri de la même fascination de la cinéaste pour la parole comme trace d’une résistance. Mais, plus qu’un outil qui enregistrerait les récits mêlés d’une utopie réalisée à plusieurs endroits du pays, la caméra de Samanta Yépez s’énonce d’abord comme éprise de rencontres, tournée vers des personnes toujours animées par une haute idée de la liberté et de la fraternité. Ces face-à-face s’entremêlent parfois d’images d’archives rares – tournées à Pessac pendant la construction de la cité de 1948 à 1952 – et de lectures en voix off (celle de la réalisatrice elle-même) du Bulletin de Liaison des Castors de Pessac. Certes, sur le thème de l’égoïsme dominant, ces constats d’un autre âge pourront surprendre par leur sidérante actualité. Mais surtout, à force d’avoir su redonner au travail toute sa valeur marchande, les protagonistes de Pays Castor nous rappellent qu’ils sont parvenus à un mieux-vivre ensemble. Cette noblesse de l’engagement communautaire est au cœur du film de Samanta Yépez qui en perpétue l’héritage. Avec une humilité tout aussi convaincante.
Nicolas Milesi

Pays castor
Réalisateur(s) : Samantha Yepez
Acteur(s) : Documentaire
Genre(s) : Chronique ouvrière
Origine : FR
Durée : 0h55
Synopsis : Dans la pénurie d’après-guerre, des jeunes gens s’organisent dans toute la France pour construire eux-mêmes leurs maisons. Ils se nomment les Castors. En coopérative, ils se regroupent et rendent possible un rêve. Un journal écrit par les pionniers. Et un film tourné par un de ces hommes, Jean Odet, électricien. C’est ce qu’il reste. Avec ces textes et des photogrammes, la réalisatrice Samanta Yépez, est partie à la rencontre de ces hommes et de ces femmes, de leurs cités et du pays qu’ils ont bâti.