PERFECT DAYS

PERFECT DAYS

PERFECT DAYS

Réalisateur(s) : Wim Wenders
Acteur(s) : Koji Yakusho, Tokio Emoto, Arisa Nakano
Genre(s) : Drame
Origine : Allemagne, Japon
Durée : 2h5
Synopsis : Hirayama travaille à l’entretien des toilettes publiques de Tokyo. Il s’épanouit dans une vie simple, et un quotidien très structuré. Il entretient une passion pour la musique, les livres, et les arbres qu’il aime photographier. Son passé va ressurgir au gré de rencontres inattendues. Une réflexion émouvante et poétique sur la recherche de la beauté dans le quotidien.

Grand amoureux du Japon et du cinéaste Yasujirō Ozu qu’il considère comme son maître, Wim Wenders revient filmer Tokyo presque 40 ans après son documentaire Tokyo-Ga, dans une fiction qui suit le quotidien simple et très structuré d’Hirayama, un personnage travaillant à l’entretien des toilettes publiques. Au Japon, ces lieux sont parfois de véritables merveilles d’architecture car ils sont associés aux idées de bien commun, de respect mutuel pour la ville et pour les autres. (Un point de vue très différent de la vision occidentale, simplement soucieuse de l’assainissement.) C’est l’acteur Koji Yakusho, admiré depuis longtemps par Wenders, qui a été choisi avant même que le rôle d’Hirayama ne soit écrit. C’est peu dire que ce comédien émaillant le cinéma japonais depuis des décennies illumine Perfect Days d’un bout à l’autre (Prix d’interprétation à Cannes Ô combien mérité !). À l’instar des vitres de certains bâtiments où Hirayama va travailler (qui, par une technologie aussi mystérieuse que spectaculaire, s’opacifient ou au contraire laissent passer la lumière), la mise en scène de Wim Wenders actionne de méticuleuses variations propres à nous entraîner peu à peu dans la perception de son intrigant héros. À sa fugueuse de nièce, réfugiée chez lui, il dit : « Le monde est fait de nombreux mondes. Certains sont connectés. D’autres non. » Magie du cinéma de Wenders qui nous ouvre des portes. Ce que l’on perçoit d’abord comme la routine d’un homme solitaire et taiseux se transforme sous notre regard en une succession de moments uniques, pleinement vécus au présent par un individu revenu d’un passé riche et privilégié ; autant de rencontres et de micro-événements qui nous mènent subrepticement à un autre état de conscience, le sien. À un point tel qu’on finit par se demander si les séquences en noir et blanc qui jalonnent le film (les rêves d’Hirayama, mis en forme par la photographe Donata Wenders) n’en sont pas la seule réalité véritable. C’est que, sous ses airs sages et rangés, ce film constellé de moments de grâce provoque lentement un vertige délicieux, baigné des goûts musicaux d’Hirayama (uniquement joués sur d’anciennes cassettes audio) et de ses lectures (dont les auteurs « utilisent les mêmes mots que nous mais ils sonnent différemment »). Perfect Days charme et dépayse profondément, bien au-delà de la vision de la Tokyo Skytree que des arrière-plans récurrents rendent quasi tutélaire. Étranger au souci de la performance et à tous ses ersatz numériques, sourd aux vanités sociales, Hirayama nous hisse vers une temporalité pareille à celle des arbres – presque un éternel présent. L’antienne qui le mène a la beauté de la simplicité : « La prochaine fois c’est la prochaine fois. Maintenant, c’est maintenant ».  À l’issue d’un parcours ingénieusement mis en scène, jusque dans un ultime plan-séquence magnifique, Perfect Days vous ravira. ⎥ Nicolas Milesi

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