Après avoir évoqué son enfance ( La Danza de la Realidad ), Alejandro Jodorowsky nous raconte son passage à l’âge adulte et donc la genèse de son engagement artistique. Moment toujours difficile pour tout être humain mais particulièrement pour un créateur en gestation qui doit affronter un père castrateur qui considère tous les poètes comme des “pédés”. Pour ce faire, il confie le rôle de son père, ce haïssable petit boutiquier homophobe et violent envers les pauvres, à son fils Brontis quand il fait jouer à Adan, son autre fils, le rôle principal, le sien : ils sont tous deux épatants (tout comme le reste de la distribution). Alejandro Jodorowsky n’oublie pas d’être présent épisodiquement à l’écran pour corriger ou pour commenter la représentation en cours comme, à la fin du film, au moment de la séparation particulièrement violente entre le fils et son père (ce sont donc les deux frères qui s’affrontent). Cette surcharge signifiante qui ravira tous les psys est pleinement surréaliste. Comme tout le film du reste qui réussit à l’être de bout en bout notamment d’un point de vue formel : chaque plan réserve une surprise, une trouvaille esthétique ou narrative (les personnages en noir qui assurent la transmission entre les protagonistes), un truc à la Méliès. La jubilation est constante avec cette impression délicieuse de retrouver la magie de l’enfance. Et cela sans jamais verser dans le kitch et en réussissant à sublimer le sordide ou le pornographique : Cf. les 2 scènes de sexe pourtant extrêmement risquées. Il ne reste plus qu’à espérer que les dieux feront montre de suffisamment de grandeur pour prêter vie à ce créateur qui les concurrence afin qu’il puisse achever, par un troisième volet, son autobiographie. ⎥ Jean-marie Tixier

POESÍA SIN FIN
Réalisateur(s) : Alejandro Jodorowsky
Acteur(s) : Adan Jodorowsky, Pamela Flores, Brontis Jodorowsky
Genre(s) : Fantastique, Biopic, Drame
Origine : France, Chili
Durée : 2h8
Synopsis : Dans l’effervescence de la capitale chilienne Santiago, pendant les années 1940 et 50, « Alejandrito » Jodorowsky, âgé d’une vingtaine d’années, décide de devenir poète contre la volonté de sa famille. Il est introduit dans le cœur de la bohème artistique et intellectuelle de l’époque et y rencontre Enrique Lihn, Stella Diaz, Nicanor Parra et tant d’autres jeunes poètes prometteurs et anonymes qui deviendront les maîtres de la littérature moderne de l’Amérique Latine. Immergé dans cet univers d’expérimentation poétique, il vit à leurs côtés comme peu avant eux avaient osé le faire : sensuellement, authentiquement, follement.